Le procureur de la République a annoncé ce lundi que son parquet faisait appel de la relaxe prononcée le 4 juillet dernier à l’encontre de l’ancienne maire de Canteleu Mélanie Boulanger. Elle a été relaxée des faits qui lui étaient reprochés de complicité de trafic de drogue, après le démantèlement d’un vaste réseau de trafic de drogue à Canteleu, près de Rouen, à l’automne 2021.
Après un mois de procès, le parquet de Bobigny avait, fin juin, requis à l’encontre de Mélanie Boulanger, un an de prison avec sursis, ainsi que cinq années d’inéligibilité et 10.000 euros d’amende. Des réquisitions qui n’avaient pas été suivies par le tribunal de Bobigny, qui l’avait relaxée. Le parquet fait donc appel. L’avocat de Mélanie Boulanger, maître Arnaud De Saint-Rémy se dit très surpris et dit ne pas comprendre cette décision.
France Bleu Normandie : quelle est votre réaction à cet appel concernant la relaxe de Mélanie Boulanger ?
Arnaud De Saint-Rémy : Je suis très triste et je trouve que c’est incompréhensible. Je ne comprends pas que l’accusation persiste dans son erreur. Lorsqu’un tribunal, en toute impartialité à l’issue d’un procès qui a duré près d’un mois et qui s’est tenu dans des conditions tout à fait remarquable, reconnaît que le dossier d’accusation est vide, qu’il n’existe en réalité aucun élément de complicité par action, ni même par abstention, qu’il n’y avait pas eu d’intention marquée de s’impliquer dans le trafic de stupéfiants ou de le favoriser, comme cela a été dit dans le jugement, alors que Mélanie Boulanger l’a toujours combattu, qu’on ne saurait condamner une innocente sur des interprétations, des impressions, des généralités. On aurait pu penser sinon que l’accusation présente des excuses, faut pas quand même rêver, mais à tout le moins, qu’elle prenne de la hauteur, qu’elle passe à autre chose, qu’elle reconnaisse sa défaite et que surtout, elle laisse enfin Mélanie Boulanger à la tranquillité d’esprit que j’appelle de mes vœux. À l’inverse, l’accusation insiste et persiste.
Pourquoi l’accusation persiste-t-elle selon vous ?
C’est assez difficile de le comprendre parce qu’il est rare qu’un parquet fasse appel d’une relaxe. Est-ce que c’est un entêtement de la part de l’accusation ? Ça laisse effectivement à penser que l’accusation ne veut pas perdre la face, je n’ose l’imaginer. Je n’irai pas jusque-là. Je déplore simplement, mais avec beaucoup d’amertume, qu’une fois encore, nous devions nous battre. Mais nous le ferons jusqu’au bout. Et j’imagine que la Cour d’appel aura le même discernement que le tribunal a eu, en confirmant en appel la relaxe.
Vous pensez que le parquet est mauvais perdant ou qu’il est convaincu de la culpabilité de Mélanie Boulanger ?
Je ne le sais pas. Mais ce qui est certain, c’est que les attendus du tribunal dans son jugement étaient, pour reprendre une expression, « sans appel ». Une fois encore, le tribunal a considéré qu’il n’y avait rien dans le dossier, que ce dossier était vide, que l’accusation reposait sur les brouillards de la lune. On ne peut pas condamner une personne sur des interprétations, sur des impressions, sur des généralités. Je pense que l’accusation ne veut pas se déjuger, ne veut pas se remettre en cause et continue dans ce que moi je considère comme étant une erreur. Depuis plus de 33 mois ma cliente vit un enfer. La relaxe lui avait fait espérer de pouvoir enfin sortir la tête de l’eau. Elle lui a d’ailleurs permis de recouvrer d’une certaine manière son honneur. Nous avions espéré que le cauchemar était terminé. Il continue. Sauf à ce que l’accusation renonce à son appel. Elle a encore la possibilité de le faire, tant que la cour d’appel n’est pas saisie, tant que la cour d’appel n’a pas tenu son audience, l’accusation peut renoncer à son appel. Et c’est ce que je souhaite. J’en appelle au discernement de l’accusation. Nous continuerons de notre côté à nous battre jusqu’au bout, sans cesse et sans relâche. Il le faut. Mais je ne vous cache pas que ma cliente est assez désespérée par l’insistance avec laquelle le parquet décide de la renvoyer une fois encore devant des juges.
Comment va Mélanie Boulanger ? Comment réagit-elle à la perspective d’un nouveau procès pour elle ?
C’est une douche froide, elle va très mal. Autant dans ces derniers jours, on était dans l’expectative de l’issue du délai d’appel. Nous apprenons le dernier jour d’expiration du délai d’appel qu’il y a eu un appel. De mon côté, je n’ai pas été avisé qu’il y avait un appel. Je n’ai reçu aucun message ni aucune notification éventuelle et officielle, et je n’ai appris l’existence de cet appel que par la presse qui en a été directement informée. Je trouve ça extrêmement triste de l’apprendre de cette manière. Et au-delà de la manière dont nous avons appris cet appel, vous imaginez très bien dans quelles affres psychologiques ma cliente se retrouve. Alors bien sûr, nous allons être devant une cour d’appel fort d’une relaxe qui a été prononcée en sa faveur. Mais d’une certaine manière, il faut tout reprendre. Il faut à nouveau convaincre les juges. Il y a eu nos témoins qui ont apporté une contradiction à l’accusation qui semblait être comme un rouleau compresseur inaltérable. J’espère véritablement que ce qui s’est passé devant le tribunal, nous allons à nouveau le vivre devant la Cour d’appel. C’est extrêmement angoissant pour elle. Nous sommes maintenus dans cet état d’angoisse permanente, car tant que la justice n’a pas été définitivement rendue, tant que la page n’est pas définitivement tournée, vous n’êtes évidemment pas tranquille. »
Mais est-ce que ça a été une surprise pour vous, cet appel ? Parce qu’il y avait une différence entre la relaxe prononcée et les réquisitions du parquet ?
Bien sûr que c’est une surprise. C’est d’autant plus une surprise que le tribunal a, une fois encore, indiqué que ce dossier d’accusation était vide, que rien ne pouvait mettre en évidence qu’il y ait eu chez Mélanie Boulanger une intention de s’impliquer dans le trafic de stupéfiants, de le favoriser d’une quelconque manière, alors qu’elle l’a toujours combattu. C’est une fois encore une incompréhension de la part du représentant du ministère public de maintenir ce dossier d’accusation coûte que coûte alors que il n’y a rien dedans. C’est une véritable surprise. […] Mais vous vous imaginez très bien encore des mois d’attente, encore des nuits d’angoisse à savoir si ce cauchemar va se terminer. Pour Mélanie Boulanger, c’est absolument insupportable à vivre, une angoisse permanente avec cette épée de Damoclès qui peut s’abattre sur vous au final. Moi, j’ai vraiment le grand espoir que la Cour d’appel ait le même discernement qu’a pu avoir le tribunal ».
L’avocat de Mélanie Boulanger demande au parquet de Bobigny de changer d’avis, il peut encore annuler son appel, il a un mois pour le faire jusqu’au 15 août.
Le procès en appel va concerner neuf prévenus (sept prévenus ont fait appel de leur condamnation et deux appels ont été formulés par le parquet), dont Mélanie Boulanger, sur les 18 prévenus qui ont été jugés en juin. Il se tiendra devant la cour d’appel de Paris.
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