Notre entretien téléphonique s’affranchit de toute plaidoirie. Depuis Marseille, où il séjourne, Jacques Verrechia n’a pas à convaincre de l’intérêt et de l’utilité de son livre Avocat du Patron, à paraître chez Mareuil Editions ce 3 juin. L’ouvrage rejoint une abondante littérature déjà parue sur Johnny Hallyday. Mais l’auteur n’est pas n’importe qui : spectateur de Johnny à l’âge de 12 ans, il l’a ensuite croisé alors qu’il accompagnait musicalement Antoine et Dick Rivers, avant de devenir… son avocat, de 1982 à 2007 ! C’est un Johnny étonnamment complexe – à la fois infidèle et exclusif, touchant et caractériel, instinctif mais menteur, lâche parfois – qu’il raconte, en même temps que la professionnalisation de la célébrité. Sans doute la tendresse demandait-elle une certaine lucidité. Entretien.
Gala : Avez-vous hésité à publier Avocat du Patron ?
Jacques Verrechia : Oui. Depuis la mort de Johnny, tant de gens ont écrit sur lui sans l’avoir vraiment connu ni vécu les situations qu’ils rapportent. Mon livre retrace surtout mon parcours en tant que pianiste, puis avocat. Johnny en fait partie intégrante. Mais ce n’est pas un énième ouvrage sur Johnny.
Gala : Vous dépeignez pourtant un homme moins caricatural, plus complexe qu’on ne l’a écrit.
Jacques Verrechia : Je ne relate que du vécu. Je ne souhaitais pas engager de polémiques ni rédiger une hagiographie. Je n’ai jamais été un fan. Pendant cinquante ans, de façon plus ou moins marquée selon les époques, j’ai en revanche partagé son intimité.
Gala : La confidentialité de vos échanges n’a jamais été un dilemme ?
Jacques Verrechia : Je ne romps pas mon devoir de réserve. Je rectifie des faits qui ont été mal reportés ou mal compris, comme les enjeux de sa succession. Mais je n’exploite pas sa vie privée. Il y a des choses que je ne raconterai jamais.
Gala : Avez-vous demandé à sa famille l’autorisation d’écrire sur lui ?
Jacques Verrechia : Non. Il est possible que mon livre ne plaisent pas à certains. Mais j’espère que les réactions ne seront pas trop mauvaises.
« Tout le monde s’est dit l’ami de Johnny… J’ai préféré rester un complice »
Gala : Vous refusez la qualification d’ami. Vous évoquez plutôt une sorte de compagnonnage…
Jacques Verrechia : Tant de monde s’est dit l’ami de Johnny… Le mot est galvaudé. Johnny lui-même entretenait la confusion de ceux qui l’entouraient, alors qu’en vérité, des vrais amis, il n’en comptait pas plus d’une dizaine. J’ai vu tellement des gens se faire écarter, du jour au lendemain, sans explication, que j’ai préféré rester un compagnon, un complice.
Gala : Vous l’avez applaudi pour la première fois, à l’âge de 12 ans. Vous l’avez recroisé, alors que vous accompagniez au piano les chanteurs Antoine et Dick Rivers. Quand Johnny fait appel à vos services en 1982, qui est le plus flatté : l’ex-musicien ou l’avocat ?
Jacques Verrechia : Le deuxième, car il était déjà très connu. J’étais conscient qu’il fallait que je lui apporte quelque chose. Je lui ai demandé ce qu’il attendait de moi. Il m’a répondu qu’il ne voyait son avocat qu’en cas de problème. J’ai pensé qu’il ne fallait pas attendre ce genre de situations. Parce que, musicien, j’avais connu les tournées mal organisées et les promoteurs véreux, je l’ai incité à déposer le nom Johnny Hallyday, à en faire une marque. C’était assez inédit en France. Certains dans son entourage s’en sont offusqués. Plus lucide, Johnny m’a dit : « Ce qui compte, c’est que tu me fasses gagner de l’argent, tu fais comme tu veux, et tu ne rapportes qu’à moi. »
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« On a pris Johnny pour un imbécile… Il n’a cessé de me bluffer »
Gala : Johnny était plus intelligent qu’on ne le pensait ?
Jacques Verrechia : On l’a pris pour un imbécile, on l’a surnommé « Jojo » avec familiarité. Mais à ses débuts, il était surtout timide. Avec les années, il a pris de l’assurance. C’est bien lui qui menait les entretiens avec les journalistes. Il n’a cessé de me bluffer. En ma qualité d’avocat, je lui disais parfois des vérités que les autres lui cachaient. Il pouvait bouder pendant quinze jours ou un mois. Mais il revenait. Il y avait entre nous une confiance absolue.
Gala : Quelle était sa plus grande qualité ?
Jacques Verrechia : Son instinct, quasi animal. Et son aura, quand il entrait dans une pièce.
Gala : Son pire défaut ?
Jacques Verrechia : C’était le plus grand des menteurs. Il en éprouvait presque de la jubilation. Je l’ai entendu dire blanc aux uns et noir aux autres…
Gala : Vous allez vous revoir jusqu’en 2017, mais Johnny met fin à votre collaboration, dix ans plus tôt, en 2007. Vous l’acceptez sans affect. Vous semblez même soulagé…
Jacques Verrechia : Un peu, oui. Il avait quitté Universal Music et un procès les opposait encore. Mais je venais de négocier avec Warner Music un contrat dont il était très satisfait. La pression avait été énorme. Johnny était devenu mon seul client. Nous étions arrivés au bout de quelque chose. Sa décision m’est apparue comme un signe du destin. J’allais pouvoir retrouver une vie normale avec mon épouse et mes enfants. Travailler pour Johnny, c’était quand même rester à sa disposition, et il savait se montrer très persuasif, quand vous lui opposiez d’autres obligations. Après notre séparation, j’ai rejoint un cabinet d’avocats américains, à Los Angeles. J’y ai revu Johnny, par hasard, en 2013, comme si nous nous étions quittés la veille.
« Johnny n’osait pas confronter les gens, il pouvait être un peu lâche »
Gala : Vous dissipez le fantasme d’une Laeticia qui aurait pris l’ascendant sur son époux…
Jacques Verrechia : Johnny n’osait pas confronter les gens, il pouvait être un peu lâche. Tout comme il l’avait fait avec ses autres compagnes, il a mis Laeticia sur un piédestal. Il l’a convaincue qu’elle était investie d’une mission. Il l’a laissée faire le tri dans leur entourage. Mais d’autres compagnes, Sylvie Vartan la première, ont fait la même chose en leur temps.
Gala : Universal Pictures et Jalil Lespert viennent d’annoncer le tournage d’un biopic centré sur la relation entre Laeticia et Johnny. S’agit-il d’un angle pertinent à vos yeux ?
Jacques Verrechia : Je me garderai de critiquer ce projet, tant que je n’en ai pas vu le résultat final. Je ne sais pas si Laeticia y collabore, mais elle est quand même la mieux placée pour raconter ce qu’elle a vécu avec Johnny. Après, si le film remonte aux années 60, quand elle n’était pas encore née…
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Laeticia versus David et Laura : « Il aurait fallu calmer le jeu tout de suite »
Gala : Laeticia, David et Laura se sont enfin mis d’accord sur la succession de Johnny, en 2019. N’auraient-ils pas pu s’arranger plus vite, avec de la bonne volonté ?
Jacques Verrechia : Je n’ai pas participé aux premières procédures. Des initiatives malheureuses ont été prises. Le rôle d’un avocat est de conseiller, mais il arrive que certains ne soient pas bien inspirés. Il aurait fallu calmer le jeu tout de suite, être dans la conciliation plutôt que dans l’offensive. Ce que j’ai plaidé, quand j’ai rejoint les débats.
Gala : Johnny vous manque-t-il ?
Jacques Verrechia : Le quotidien est devenu un peu insipide, c’est vrai. Ce n’est plus l’avocat, mais l’homme qui vous parle. J’ai vécu des moments extraordinaires à ses côtés. Je pense à nos voyages, à ces destinations comme Bali qu’il m’a faites découvrir. Je ne rencontrerai plus personne de son envergure. Il n’y a plus de stars comme lui, en France.
Retrouvez les bonnes feuilles de Avocat du Patron, de Jacques Verrechia, dans le magazine Gala en kiosque ce jeudi 30 mai.
Crédits photos : Collection personnelle Jacques Verrechia
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