Le 6 août 2024, le tribunal correctionnel de Pontoise a rendu une décision notable concernant l’application récente de la loi du 22 avril 2024. Cette loi s’inscrit dans le cadre des recommandations de la Commission européenne, formulées le 28 septembre 2023, enjoignant la France à se conformer aux directives européennes relatives à l’environnement, à la justice et aux transports.

Parmi celles-ci, la directive 2013/48/UE, qui garantit le droit d’accès à un avocat au cours des procédures pénales, était particulièrement visée. À l’époque, seules la France et la Tchéquie permettaient encore l’audition d’un prévenu sans la présence d’un avocat si ce dernier, bien qu’averti, ne se présentait pas dans le délai d’usage.

Dans cette affaire, le tribunal correctionnel de Pontoise s’est aligné sur d’autres juridictions, notamment celle de Paris, en appliquant le nouvel article 63-4-2 du Code de procédure pénale, consacrant ainsi l’esprit de la directive européenne précitée.

Les faits

Un mis en cause, placé en garde à vue pour détention, offre ou cession de stupéfiants, avait demandé à être assisté par un avocat. Toutefois, son audition, ainsi que l’exploitation de son téléphone portable, ont eu lieu en l’absence de son conseil. Pendant cette audition, le prévenu a détruit son téléphone et insulté une fonctionnaire de police. Bien que le téléphone soit une preuve essentielle pour établir un éventuel trafic de stupéfiants, le tribunal a estimé que son exploitation sans la présence d’un avocat, en dépit de la demande formulée par le mis en cause, violait l’article 63-4-2, entraînant ainsi l’annulation des preuves matérielles relatives au trafic de stupéfiants, ne laissant que la destruction de matériel et l’outrage comme infractions retenues.

I. L’audition en garde à vue et la présence obligatoire d’un avocat.

L’article 63-4-2 du Code de procédure pénale dispose que la personne gardée à vue peut demander la présence d’un avocat à ses auditions et confrontations. En son absence, elle ne peut être entendue, sauf renonciation express. Ce principe vise à garantir les droits de la défense et à prévenir tout grief lié à une audition sans avocat. La jurisprudence confirme que l’absence de l’avocat constitue en soi un grief, sans nécessité de démonstration particulière [1] .

Le Code de procédure pénale prévoit toutefois des exceptions pour des raisons impérieuses, soumises à l’autorisation écrite et motivée du procureur de la République ou du juge des libertés et de la détention. En l’espèce, aucune exception n’a été soulevée, rendant la nullité de l’audition inévitable et entraînant l’invalidation de l’exploitation du téléphone.

II. L’application pratique de la loi en matière d’exploitation de téléphone.

En annulant le procès-verbal d’audition, le tribunal a rappelé deux principes fondamentaux : l’exploitation d’un téléphone doit se faire en présence du mis en cause, cette opération s’apparentant à une perquisition.

Cette exploitation constitue également une audition relevant du régime de la loi nouvelle, imposant la présence d’un avocat.

Ainsi, un officier de police judiciaire ne peut valablement auditionner un mis en cause ayant demandé la présence d’un avocat sans que cette présence soit effective, sous peine de rendre inopérantes les preuves issues de la garde à vue. Toutefois, la destruction du téléphone par le prévenu, en l’absence de son avocat, a été jugée comme un acte de flagrance, fondé sur les témoignages des policiers présents et les déclarations du mis en cause, suffisant à établir la culpabilité.

Enfin, l’absence de dégradations ou d’outrages aurait pu permettre une relaxe totale, la nullité de l’audition initiale étant susceptible de porter grief au mis en cause quant aux conseils qu’il aurait pu recevoir. Cette question soulève également des enjeux liés à la présence de l’avocat lors de perquisitions, notamment lors de l’exploitation d’un téléphone, reflétant une évolution vers un renforcement de la protection des droits en matière pénale.

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