PORTRAIT – Ce sexagénaire affable et discret, avocat de profession, partage depuis une dizaine d’années la vie de la candidate démocrate.
Washington
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Doug Emhoff reconnaît volontiers qu’il est parfois un peu pataud. En 2013, l’une de ses clientes décidait de jouer les entremetteuses et proposait à cet avocat divorcé de Los Angeles de rencontrer sa copine Kamala Harris. « Jamais personne n’a suggéré de l’appeler à 8h30 du matin », raconte Doug Emhoff avec humour. C’est pourtant ce qu’il fit. Il tomba sur son répondeur et bredouilla un message interminable et plutôt décousu. Miraculeusement, Kamala Harris, procureur de l’État de Californie à l’époque, trouva l’épisode amusant et le rappela. Un an plus tard, ils étaient mariés.
Depuis, ce (presque) sexagénaire affable et discret soutient avec ferveur l’ambition politique de sa femme, de procureur à sénatrice, puis vice-présidente et bientôt peut être commandante en chef des États-Unis. Si la candidate démocrate est élue, « Dougie », comme elle le surnomme affectueusement, va devenir le premier First Gentleman à la Maison-Blanche, après avoir été le premier mâle et le premier juif conjoint d’une vice-présidente.
Passionné de golf
Ce n’est sans doute pas tout à fait ce dont il avait rêvé. Après des études de droit financées en partie par des petits boulots chez McDonald’s, il devient avocat d’affaires de haut vol et travaille dans plusieurs cabinets prestigieux. Dans la foulée, ce passionné de golf se marie et a deux enfants, Cole et Ella, nommés respectivement d’après le saxophoniste John Coltrane et la chanteuse Ella Fitzgerald. Mais, en 2009, le couple divorce. Selon un tabloïd britannique, il aurait eu une liaison avec une enseignante de l’école primaire de ses enfants et affirme qu’elle serait tombée enceinte.
« Pendant mon premier mariage, on a traversé, Kerstin et moi, des moments difficiles suite à mes actions. J’en ai assumé la responsabilité », a-t-il déclaré dans un communiqué. Il a conservé de bonnes relations avec son ex, qui a produit avec leur fils une vidéo touchante sur sa vie, diffusée à la convention démocrate. Quant à Kamala Harris, elle est apparemment très proche de Cole et d’Ella qui l’ont baptisé « Momala », mais aussi de Kerstin. Cette dernière l’a défendue contre les attaques des républicains. « On plaisante parfois sur le fait que notre famille moderne fonctionne presque trop bien », écrit-elle dans ses Mémoires.
En 2020, Joe Biden choisit Kamala Harris comme vice-présidente. Cela oblige Doug Emhoff à quelques sacrifices professionnels. Il démissionne de son cabinet d’avocats après trente ans de carrière, pour éviter d’éventuels conflits d’intérêts, et la suit à Washington. « Mon métier me manque tous les jours », confie-t-il dans un livre sur les premières dames. Il incarne l’homme moderne fier de soutenir la carrière politique de son épouse, mais en est réduit, comme toutes les femmes de vice-président avant lui, à jouer un rôle de second plan très conventionnel à la Maison-Blanche. Il visite des centres de vaccination pendant la pandémie, fait beaucoup de représentation et s’occupe de choisir les papiers peints de leur résidence à Washington. « Je suis là pour lui donner le soutien dont elle a besoin », répète-t-il.
Combat contre l’antisémitisme
Sur le modèle de Jill Biden qui a continué à travailler comme enseignante, même en étant First Lady, l’ancien avocat donne, lui, des cours de droit à l’université de Georgetown. Habituellement, le métier de conjointe de vice-président consiste à choisir une ou deux causes inoffensives. Jill Biden a sensibilisé les Américains au risque du cancer du sein, Karen Pence, l’épouse du colistier de Donald Trump, a lancé une initiative pour promouvoir la thérapie par l’art… Doug Emhoff, encouragé, dit-il, par Kamala, se concentre sur le combat contre l’antisémitisme, surtout après l’attaque du Hamas le 7 octobre dernier.
Il s’est rendu à Auschwitz en 2023 à l’occasion de la journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste. Lors de sa visite à Paris pour les JO, il a assisté à une cérémonie de commémoration en hommage aux six victimes de l’attentat de la rue des Rosiers en 1982. Il a réuni les leaders juifs à la Maison-Blanche pour discuter de la violence à l’égard de la communauté, a rencontré des familles d’otages et défend Israël. Sa femme, pendant ce temps, s’est imposée au sein de l’Administration comme l’une des critiques les plus visibles du premier ministre Benyamin Netanyahou, et de la crise humanitaire à Gaza.
Mardi, lors de son discours à la convention démocrate, Doug Emhoff est apparu sous un autre jour : un papa gâteau qui adore faire le pitre, y compris lors d’événements officiels. Sur son bras, il a tatoué, à côté des initiales de ses enfants, le caractère chinois du dragon. Il se pose en féroce défenseur de la vice-présidente. Lorsque, au cours d’un meeting électoral en 2020, un manifestant a arraché le micro des mains de sa femme, ce monsieur grisonnant au tempérament plutôt placide a sauté sur la scène pour le maîtriser. À chaque anniversaire de mariage, raconte-t-il, Kamala lui fait réécouter le message un peu pâteux qu’il lui a laissé la première fois. Cette année pourtant, il n’est pas sûr qu’elle en ait eu le temps. La célébration de leurs dix ans de vie commune est tombée jeudi dernier, le jour où elle a accepté l’investiture démocrate pour la présidentielle.
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