La première fois qu’il rencontre le général de Gaulle, le 29 juin 1940, Gustavo Camerini est pour le moins mitigé. Aligné avec les officiers de la 13e demi-brigade de la Légion étrangère, il salue avec défiance cet homme au visage dur, venu sonder les soutiens au Trentham Park, à 250 kilomètres de Londres. «Messieurs, on va vous appeler un par un et vous me direz si vous êtes disposé à rester ou si vous préférez rentrer chez vous.» Intimidé, Gustavo entend les défections de certains généraux de vieilles familles françaises, s’avance, serre la main du Général, et s’engage dans les Forces françaises libres.
À cette époque, il ne s’appelle déjà plus Gustavo mais Clarence, pour éviter toutes représailles contre sa famille. Son choix, il l’a fait seul, à la fin de l’été 1938, quand il a vu Mussolini courtiser Hitler. À 31 ans, l’avocat au barreau de Milan, fils d’un banquier italien d’origine juive, goûte alors la dolce vita que son milieu et ses charmes lui offrent. Réveil brutal. Il gagne Paris, choisit la Légion puis, impatient d’en découdre, la 13e demi-brigade qui embarque dès avril 1940 pour la Norvège. Premier mort, premier enterrement, et très vite cette antienne : «Heureusement, ce n’est pas encore moi, cette fois. »
Après un bref retour sur les côtes du Finistère, c’est au large de l’Écosse qu’à la TSF la voix de Mussolini proclamant « l’heure des décisions irrévocables » le désespère. L’Italie déclare la guerre à la France ainsi qu’à l’Angleterre, et Gustavo se terre. Le soutien discret que lui témoigne à ce moment-là la troupe pèse sans doute dans sa décision, au Trentham Park, de rejoindre le général de Gaulle. Quelques lignes à sa mère, un casque colonial, et voilà Clarence en route pour Dakar.
Séjours dorés hors des temps de combat
Face aux pétainistes qui les accueillent là par le feu, Clarence oppose toujours le silence, par fidélité cette fois à la ligne qu’il s’est fixée : ne pas intervenir dans les affaires intérieures françaises. Et c’est finalement au Cameroun que son unité se présente au général Leclerc. Un homme qui connaît son affaire, se réjouit-il, rêvant de faits d’armes rapides depuis que Churchill a promis la victoire en six mois. La « guerre du désert » pourtant n’en est qu’à son début, et Clarence part bientôt affronter les troupes italiennes en Érythrée.
Sur ce continent africain, le légionnaire installe sa manière singulière de faire la guerre, avec l’accord tacite de sa hiérarchie, alliant courage au front et séjours dorés, dans les palaces de Durban, Beyrouth ou du Caire, hors des temps de combat. Cette liberté, il en a les moyens et en accepte la contrepartie : ne pas progresser dans les rangs de l’armée. Il n’échappe pas pour autant aux blessures, à trois reprises. Et participe à la campagne de Syrie, puis de Libye, avec la 1re division légère française libre commandée par le général Koenig.
Compagnon de la Libération resté en Italie
Autour de Bir Hakeim, la vie des soldats tient à des tranchées entourées de champs de mines. Aux prisonniers italiens, Clarence crie la honte d’avoir rallié Hitler. Mais la véritable bataille, c’est contre les hommes de Rommel qu’il la livre, la peur au ventre et à l’esprit, la promesse d’une voyante d’en sortir vivant. L’attendent encore les combats en Tunisie, la sanglante campagne d’Italie, et une profonde meurtrissure. Après avoir approché Rome en liesse le 5 juin 1944, Clarence passe de la fièvre à la fureur. Mis à disposition de l’ambassade de France, il laisse ses camarades partir seuls vers la Provence, lui, compagnon de la Libération depuis un an. Peut-être le Général préfère-t-il des visages français aux premiers rangs des libérateurs, pense-t-il, amer.
Retourné après-guerre à ses activités d’avocat, Gustavo Camerini fut promu commandeur de la Légion d’honneur en 1980. La lettre qu’il adresse alors à l’ordre de la Libération se termine ainsi : «Je ne saurais indiquer d’autres… actions méritoires ! Si ce n’est (sans mérite d’ailleurs) mon affection fidèle et constante pour le Vieil Hexagone et pour les anciens, vivants ou morts hélas, camarades d’espoir et d’entreprise. » Au soir de sa vie, il dicte ses Mémoires pour leur rendre hommage, sans avoir le temps de les relire avant son décès, le 26 septembre 2001.
Récit écrit à partir de l’ouvrage de Gustavo Camerini, Ce soir nous monterons tous au paradis (Éditions du félin) et des archives du Musée de l’ordre de la Libération.
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La « guerre du désert »
On désigne par cette expression l’ensemble des opérations qui se sont déroulées en Afrique du Nord entre septembre 1940 et mai 1943. L’historien Olivier Wieviorka, dans son Histoire totale de la Seconde Guerre mondiale, note qu’elle porte bien mal son nom car toutes les opérations majeures ont été menées à moins de 80 kilomètres du littoral pour maîtriser la Méditerranée.
Son aura tient aux batailles de Bir Hakeim conduites par les Français libres et El-Alamein par les Britanniques, et à ses figures, Rommel pour le Reich, Montgomery pour les Britanniques. L’intensité des affrontements contraste avec la faiblesse des intérêts économiques et militaires des belligérants, au-delà du pétrole du Moyen-Orient et du contrôle du canal de Suez.
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